Maestro J DILLA

 Être autant adulé par la profession et par le public spécialisé sans jamais montrer son visage, c’est une des nombreuses prouesses à mettre à l’actif de J Dilla.

Auprès du public hip-hop et des amateurs de jazz, J Dilla est mis au même rang que Pete Rock, DJ Premier ou Kanye West. Pharrell Williams a dit « qu’il admirait son travail comme aucun autre ». Aussi connu sous le pseudo « Jay Dee », il est un producteur fabuleux, un « beatmaker » redoutable à la culture musicale immense. « Runnin’ » des Pharcyde, « Stakes Is High » des De La Soul, « The Light » de Common, c’est lui. Aucun gros hit commercial à son actif mais une multitude de succès chez les passionnés de soul, hip-hop et jazz. Il a œuvré avec les équipes « The Ummah » et « Soulquarians » en parallèle à son travail en solo.

Il est né et a grandi à Detroit. James Yancey, son vrai nom, est plongé dans la musique par ses parents. Il devient vite un fan de vynils et se nourrit de funk, de rap et de jazz passant allégrement de « Slave » à Jack McDuff et sans aucun complexe. Il apprend à jouer violon, claviers, trompette, violoncelle et surtout batterie. Ses rythmiques sont d’une richesse, d’une force et d’une technique incomparables.

 En 1988, il formait le groupe rap « Slum Village » avec ses potes Baatin et T3. Il faudra attendre 1992 et la rencontre avec Amp Fiddler pour une reconnaissance à large échelle. Mais J Dilla se moque de la reconnaissance et du succès. Sa motivation, la seule, est la passion et cet irrépressible besoin de créer. Parfois, il n’était même pas crédité dans les notes de livret.

Amp Fiddler, musicien pour Prince et Parliament, entre autres, lui enseigne le maniement de la fameuse MPC. C’est aussi Fiddler qui présente J Dilla à Q-Tip des « A Tribe Called Quest« . Ce dernier a déjà entendu des titres de « Slum Village » qu’il apprécie énormément. Q-Tip lui donne un sérieux coup de main pour mettre sa carrière en vitesse de croisière. Sa cadence de création s’accélère au milieu des années 1990 lorsqu’il compose des rythmiques pour Busta Rhymes, De La Soul et les Pharcyde. Il joue un rôle majeur sur les deux derniers albums des A Tribe Called Quest.

Ensuite, c’est le chemin qui forge une légende. Il travaille avec Janet Jackson (« Got Til It’s Gone »), de nouveau avec les Pharcyde et tient un rôle clef sur l’album « Amplified » de Q-Tip en 1999. Les « Slum Village » sont néanmoins toujours sa priorité. « Fantastic Vol.2 » et « Best Kept Secret » (où il apparait parfois sous les pseudos J-88 et SV) sont des succès en 2000. À cette époque, il semble être partout. Seul, avec les « Soulquarians » ou avec les Roots, il compose pour Common (« Like Water For Chocolate »), D’Angelo (« Voodoo »), Eryka Badu (« Mama’s Gun ») ou Talib Kweli (« Quality »). Jusqu’en 2005, il partage son temps entre rap et R&B. Amp Fiddler, Dwele et Steve Spacek enregistrent leurs albums avec son aide précieuse. Belle collaboration entre son groupe « Slum Village » et Daft Punk (« Aerodynamic » et « Raise It Up »).

 À partir de 2001, il est plus prolifique que jamais en solo. Il sort quelques singles, l’album « Welcome 2 Detroit », des compilations composées uniquement d’instrumentaux et des E.P. Il travaille beaucoup avec Phat Kat, Lacks et Franck-n-Dank. De belles collaborations avec « Madlib » également tel le « Champion Sound » de 2003 commercialisé sous le pseudo « Jaylib ». Mais c’est aussi l’époque où sa santé commence gravement à se dégrader…

Pendant deux ans, il est sous dialyse en permanence. Il ne quitte pas sa chaise roulante même durant sa tournée européenne de 2005. Son album « Donuts », terminé dans sa chambre d’hôpital durant une longue hospitalisation, voit le jour en 2006 pour ses 32 ans. Trois ans plus tard, il décède chez lui, dans sa maison de Los Angeles, d’un arrêt cardiaque. Une perte immense pour la création musicale. Nombreux sont les musiciens de jazz et de rap qui le mettent au même niveau que Charlie Parker. Karriem Riggins, un de ses proches, met la touche finale à son album « The Shining ». L’œuvre sort six mois après son décès. Une pluie d’hommages, d’inédits et de projets en cours de finition voit le jour les années suivantes.

J Dilla a donné ses lettres de noblesse à la MPC, au « minimoog » et au clavier « Voyager ». Il avait imposé un style en tant que « beatmaker », un tour de force. Son style était immédiatement identifiable et mettait d’accord communautés musicales spécialisées, presse et grand-public, autre tour de force.

En écoute

 J Dilla     « Last Donut Of The Night » (2006, Stones Throw)***  Acheter

 Slum Village   « Climax » (2000, Barak Records)*** Acheter

 De La Soul  « Stakes Is High »

 Common  « The Light » (2000, Geffen Records)** Acheter

 A Tribe Called Quest   « Da Booty » (1998, Zomba Recordings)*** Acheter

 Amp Fiddler  « Waltz Of A Ghetto Fly »

 Janet Jackson  « Got Til It’s Gone » (1997, Virgin)*** Acheter

 The Pharcyde  « Runnin’ » (1995, The Bicycle Music Company)** Acheter

 Daft Punk   « Aerodynamic »

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