Rencontre avec Michel Benita

 Bonjour Michel Benita

 Musiculture : Au regard de votre parcours, on remarque un fort penchant pour la recherche d’ambiances, l’expérimentation. Quel rôle a joué la période « Patric » sur ce « penchant » ?

 Michel Benita : La période à laquelle vous faites allusion représente juste mes débuts de musicien professionnel. Comme à cette époque j’habitais Montpellier, je me suis logiquement retrouvé à jouer avec des artistes locaux, comme Patric, un chanteur occitan investi dans les combats régionalistes de la fin des années 70. Musicalement, j’avais déjà la tête ailleurs, je serai très curieux d’écouter ces quelques albums (deux je crois ?), je n’ai plus aucune idée de ce qu’il y a dedans !

 M : Vous avez commencé avec un groupe puis joué avec ou pour d’autres musiciens. La formation d’Ethics, était-ce une nécessité urgente de retrouver une place de leader au sein d’un ensemble ?

 M.B. : Ce n’était pas tellement pour être leader à tout prix, mais plutôt pour me sentir bien sur scène, jouant une musique que je puisse assumer à 100%, avec une famille de musiciens qui me correspondent et partagent ma vision. Il n’y a rien de plus gratifiant que cette sensation d’adéquation parfaite, cette communion avec des artistes que l’on a réuni pour essayer de produire de la belle musique. Et comme ces quatre-là n’ont aucun problème d’ego et qu’ils ne pensent qu’en termes de collectif, l’expérience est d’autant plus satisfaisante.

 M : Comment est venue l’idée de cette formation ? Et comment avez-vous réussi cette réunion au demeurant improbable entre un norvégien, une japonaise et kptn planet ?

 M.B. : La formation est née de ma rencontre avec Mieko Miyazaki, joueuse de koto (la « harpe » japonaise) originaire de Tokyo. Nous avons vite trouvé un son, d’abord à deux, puis j’ai vite entendu quels instrumentistes pourraient se joindre à nous. En l’occurrence Eivind Aarset, le maître norvégien de la guitare « texturale », Matthieu Michel, au son de bugle et trompette magique et mon vieux complice Philippe Garcia, dit Pipon (ou Kptn’ Planet, au choix) à la batterie. Avec ce dernier j’ai partagé quelques 5 années de tournées avec Erik Truffaz. L’alchimie s’est faite immédiatement, car j’avais vraiment écrit et mis en scène la musique en pensant à eux. Je les connaissais bien, chacun séparément. Pour ce qui est des nationalités, la musique étant absolument universelle, elle abolit toute barrière : âge, langue, style. C’est l’une des ces qualités premières et en grande partie ce qui fait qu’Elle continue de me fasciner.

M : Si je ne m’abuse, voilà cinq ans que vous avez des liens assez suivis avec le label ECM. Vous semblez être bien dans la maison Eicher : Quelles en sont les raisons ?

 M.B. : Travailler avec Manfred Eicher faisait partie de mes rêves, un rêve que j’ai longtemps cru inaccessible avant de le rencontrer par l’entremise d’Andy Sheppard, le saxophoniste britannique avec lequel je joue toujours beaucoup aujourd’hui. Nous avons enregistré Trio LIbero ensemble (puis deux autres albums dont un à paraître début 2018) et dès l’année suivante, Manfred me proposait d’enregistrer le deuxième album de mon groupe Ethics, dont il avait entendu le premier opus. Il se trouve que l’on s’est tout de suite bien entendu. Peut-être parce que la première rencontre s’est faite sur un plan purement musical (l’enregistrement avec Andy et Seb Rochford). Certainement aussi parce qu’ayant le plus grand respect pour son travail magnifique de producteur avec ECM, j’ai tout de suite adhéré à sa vision et écouté ses suggestions en studio, à 90% intéressantes et dignes d’être essayées. C’est vrai que je me sens chez moi chez ECM, il y a une logique si l’on écoute mes enregistrements précédents. Tout me poussait vers ce label.

 M : Aldo Romano vient d’enregistrer Mélodies en noir & blanc avec vous et le pianiste Dino Rubino. Il dit de vous que votre amitié est un lien indissoluble. A quand remonte cette amitié ?

M.B. : Elle remonte à l’année 1983, où nous avons tous deux joué dans un album du guitariste Gérard Pansanel, pour le défunt et excellent label OWL, créé par Jean-jacques Pussiau. Depuis, nous ne nous sommes pratiquement plus quittés. Quelques éclipses ici et là, mais un dialogue musical et amical quasi-ininterrompu. Il m’a aussi fait rencontrer toute une scène italienne sans laquelle je ne serais certainement pas le même musicien aujourd’hui, notamment la pianiste Rita Marcotulli, qui est une peu comme ma sœur.

 M : Sur quel projet personnel êtes-vous en ce moment ? Allez-vous continuer le mélange des genres ?

 M.B. : En ce moment, je prépare tranquillement le prochain album, pour ECM, dans lequel on retrouvera Matthieu Michel et Philippe Garcia. Ce sera encore plus minimaliste, avec un peu d’électronique et le trio sera parfois augmenté du pianiste Jozef Dumoulin, auteur de textures sonores incroyables, qu’il obtient avec son Fender Rhodes augmenté de divers effets et pédales. Je ne sais pas encore exactement quand nous enregistrerons, mais ce sera probablement peu après une mini-résidence au « Triton » (Les Lilas) avec notre premier concert, dans le courant du mois de mai 2018.

Biographie + discographie

Photos : Jean-Baptiste Millot

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