Depuis son album « Logozo » de 1991, cette chanteuse béninoise a suivi une carrière remarquable.
Angelique Kidjo est, avec le temps, devenue une grande figure de la « world music ». Entendez par « World music » (« musiques du monde » en français) l’ensemble des musiques traditionnelles dont certaines sont devenues bien plus que des musiques ethniques ou folkloriques.
La musique d’Angelique Kidjo est africaine à la base. Mais elle a toujours été plus que ça grâce à un niveau de production supérieur et très pop. De plus, elle a toujours incorporé jazz, reggae, afrobeat, salsa à ses compositions. À ses débuts, sa voix puissante et les chœurs donnent une réelle couleur africaine à sa musique. « Agolo » en est l’exemple parfait.
Tout au long de sa carrière, elle va multiplier les collaborations. On la retrouve aux côtés de Philip Glass, Kronos Quartet, Peter Gabriel, Alicia Keys, Dr John, Branford Marsalis et bien d’autres. Tout cela participera à la construction d’une aura internationale puissante.
Fille d’une actrice, danseuse et productrice, Angelique Kidjo naît au Bénin, à Ouidah. Elle fait ses premiers pas sur scène avec la troupe de théâtre de sa mère. Elle grandit avec des influences aussi variées que Fela Kuti, Myriam Makeba, Jimi Hendrix, Carlos Santana, James Brown ou Aretha Franklin pour n’en citer que quelques-uns. À 20 ans, elle chante déjà en professionnelle et enregistre son premier album avec Ekambi Brilliant, chanteur et producteur camerounais. En 1981, sa chanson « Ninive » rencontre un certain succès et lui ouvre les portes d’une tournée en Afrique de l’Ouest. Mais la situation politique dans son pays devient insupportable. En 1983, elle émigre en France, vers Paris et Bonneuil-Sur-Marne…
À Paris, elle devient choriste pour le groupe « Pili Pili », formation « jazz fusion ». Trois albums avec le groupe avant de se lancer en solo vers une célébrité mondiale. « Parakou », premier album solo, est comme une passerelle entre son travail avec « Pili Pili » et ses compositions en solo. L’œuvre est assez forte pour attirer l’attention du maitre Chris Blackwell. Il la signe sur son label « Island » en 1991. Ses deux premiers albums chez « Island » auront un impact puissant. Ils sont emblématiques de la « world music » des années 1990 et installent son nom auprès d’un très large public.
La puissance financière du label « Island » lui ouvre des portes magiques. Joe Galdo, batteur des « Miami Sound Machine » produit « Logozo ». Manu Dibango, Branford Marsalis sont sur l’album. En 1991, le succès est énorme et elle entre N°1 des ventes « world » au « Billboard » américain. Elle part en tournée pendant plusieurs années, se produisant dans les plus grands festivals.
Là commence le chapitre deux de sa carrière : la rencontre avec les studios « Paisley Park » de Prince. Elle travaille sur son deuxième opus avec David Z, rien que ça. L’album est également produit par Will Mowat dans les studios londoniens de Soul II Soul, si !si ! Logiquement, en 1994, succès internationale pour le titre « Agolo » et l’album « Ayé ». Angelique Kidjo est nominée aux « Grammy Awards » dans la catégorie « meilleur album de world music ».
Après cette période basée sur électronique et nouvelles technologies, Angelique Kidjo aspire à un retour aux sources. L’album « Fifa » de 1996 est plus orienté vers la musique traditionnelle. Équipée d’un huit pistes et d’un micro, elle part au Bénin avec une équipe d’ingénieurs du son. But : enregistrer des musiciens traditionnels, des chanteurs et des danseurs. En 1998, « Oremi » est le premier volet d’une trilogie consacrée à l’influence des musiques africaines sur la musique contemporaine. Hip-Hop, soul et jazz au programme ainsi qu’une reprise du « Voodoo Child (Slight Return) » de Jimi Hendrix. Elle enregistre avec Cassandra Wilson, Kelly Price et le pianiste jazz Kenny Kirkland. En 2002, « Black Ivory Soul » (2eme volet de la trilogie) met en avant la culture afro-brésilienne. Carlinhos Brown et Vinicius Cantuara participent à l’album. C’est son premier album pour « Sony », dix ans après ses débuts chez « Universal ». Elle finit la trilogie avec « Oyaya ! » en 2004. Ce volet insiste sur la culture des caraïbes et sur l’apport des latinos.
Autre changement de label et arrive l’année 2007 et avec elle l’album « Djin Djin » produit par Tony Visconti. Peter Gabriel, Josh Groban, Amadou & Mariam et Ziggy Marley sont invités. Un an plus tard, l’album lui rapporte le « Grammy awards » du « meilleur album world de l’année ». Consécration, quinze ans après son premier album.
Deux ans plus tard, en 2010, elle s’entoure de Bono, Roy Hargrove, John Legend et Dianne Reeves pour la conception de son album « Oyö ». Des reprises de chansons béninoises traditionnelles, de standards de soul des 70’s et même de classiques du genre bollywood. À cette époque, elle est devenue une star aux USA et en Afrique. C’est plus difficile en Europe. Elle prend le temps nécessaire et part en Afrique. Là, elle passe du temps à enregistrer le chant de femmes africaines qu’elle utilisera ensuite pour la conception de son album « Eve » en 2014. Elle y rend hommage à la résilience des femmes africaines. Résultat : deuxième « Grammy awards » du « meilleur album World de l’année » et N°1 des ventes « World » aux USA. Elle en profite pour publier ses mémoires.
Kidjo aime surprendre. Elle l’a déjà prouvé à plusieurs reprises. Elle continue en travaillant avec Philip Glass et un orchestre philharmonique. En 2015, son album « Sings » présente une relecture symphonique de ses chansons ainsi que quelques reprises. Orchestre de 110 musiciens avec son groupe. Surprenant !
Et voilà ! 25 ans de carrière. Le temps est venu de rendre hommage à une de ses plus importantes influences. Par la même occasion, elle en profite pour montrer une fois de plus le poids du continent africain sur la musique contemporaine. Comme son nom l’indique, l’album « Celia » met en lumière la musique de Celia Cruz, reine incontestée de la salsa. Pour l’occasion, elle s’entoure de David Donatien (arrangeur et multi-instrumentiste) et du légendaire Tony Allen. Résultat : 3eme « Grammy Awards » en 2020. ça devient d’une banalité ! 🙂
Le « covid » est là. Avec lui, le confinement. Angelique Kidjo en profite pour travailler sur « Mother Nature », comme un retour aux sources, à l’essentiel. Son album le plus réussi depuis des années. Son travail le plus personnel en sept ans. Une nouvelle fois, elle s’entoure de quelques pointures : James Poyser des « Roots« , Salif Keita, Lionel Loueke, –M- et le fidèle David Donatien.
1991-2021 : on dit bravo et respect, point. Quelle carrière ! Quelle voix !
Discographie Sélective
Parakou (1990, Island)**
Logozo (1991, Mango)*** Acheter
Aye (1994, Mango)*** Acheter
Oremi (1998, Polygram)** Acheter
Black Ivory Soul (2002, Columbia / Sony)*** Acheter
Oyaya ! (2004, Columbia / Sony)** Acheter
Djin Djin (2007, Razor & Tie)*** Acheter
Öyö (2010, Razor & Tie)** Acheter
Eve (2014, 429 Records)** Acheter
Mother Nature (2021, Decca / Universal)*** Acheter